Ravel avec l'OPMC
L'Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo célèbre le 150ème anniversaire de la naissance de Maurice Ravel. Ce concert fait partie de la saison de concerts et est donné en collaboration avec le Printemps des Arts.
Il y a peu de compositeurs qui maîtrisent les pigments orchestraux aussi bien que Maurice Ravel. Kazuki Yamada et son orchestre prolongent l'exploration de l'univers magique de Ravel, après les représentations exceptionnelles de L'Heure espagnole et de l'Enfant et les sortilèges qu'ils ont donné ce mois-ci à l'Opéra de Monte-Carlo.
Ce concert met en exergue toute la richesse et l’intemporalité de la musique de Maurice Ravel.
Nelson Goerner est un des pianistes favoris du public monégasque. On le retrouve avec bonheur dans les deux concertos de Maurice Ravel, qu'on entend rarement au cours d'une même soirée.
Le concert commence avec La Pavane pour une infante défunte dans la version pour orchestre. Une élégie aux proportions oniriques, témoignage de l'émerveillement qui saisit l'âme lorsque le regard contemple l'infini et que les oreilles sont caressées par des secrets inavoués. L'orchestre sous la direction de Yamada illustre cette miniature comme un tableau clair-obscur de Velazquez.
Le Concerto pour piano (dit en sol) compte parmi les dernières œuvres achevées de Ravel. Composé entre 1928 et 1931, il est le fruit de la découverte du jazz par le compositeur lors d'un voyage aux États-Unis. Ce concerto illustre l'amour de Ravel pour la musique orchestrale, le jazz, la musique espagnole et l'élégance du XVIIIe siècle. Nelson Goerner est superbe. Son interprétation a l'éclat et la brillance de la foudre. Dans le presto il est stellaire, électrique, hypnotique et explosif.
Une Barque pour l'océan ouvre la deuxième partie du concert. La version orchestrale est plus intense qu'au piano. Yamada et l'OPMC. donnent parfaitement l'illusion sonore d'être emporté par les vagues et d'entendre le clapotis de l'eau autour de la barque
Paul Wittgenstein, avait perdu sa main droite pendant la Première Guerre mondiale et avait demandé à Ravel de créer une œuvre dans laquelle son handicap physique ne serait pas audible et où on entendrait toute la douleur et toute la souffrance de la guerre. Ravel évoque un monde incroyablement profond et émotionnel. Renouveler le genre du concerto, jongler avec une seule main mieux encore qu’avec deux et la confronter à la toute-puissance de l’orchestre, tel est le triple pari de Ravel.
Par l’invention inouïe de ses artifices, Ravel l'illusionniste nous livre un de ses plus beaux tours. L'entrée est fracassante. Le phénoménal Nelson Goerner se jette dès les premières mesures à corps perdu dans la bataille. Un déferlement de notes d’où jaillit une rare force expressive, avec des arpèges éclaboussants et des basses tonitruantes. Au fil d'harmonies de jazz épicées, de glissandos ostentatoires et de mélodies magistrales, il atterrit dans un final de grandiloquence cinématographique.Bolero termine le concert en apothéose. Il semblerait que c'est l'œuvre la plus jouée dans le monde et qu'une exécution débute toutes les quinze minutes.La dernière exécution à Monte-Carlo date toutefois de 2021. C'est un bonheur de la vivre au concert. De voir la progression des merveilleux musiciens de l'OPMC. de la petite flûte piccolo, dès 169 répétitions de la caisse claire, au feu d'artifice final avec tous les instruments.
Monte-Carlo, Auditorium Rainier III, 30 mars 2025
Crédits photographiques : Manuel Vitali / Direction de la communication-