Étienne-Nicolas Méhul,260 ans

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Son père, Jean-François, fut d’abord maître d’hôtel du Comte de Montmorency puis modeste marchand de vin à la mort du Comte. Les parents ayant détecté les dons précoces du petit Étienne, mais étant trop pauvres pour lui offrir une éducation musicale régulière, l’enfant reçut ses premières leçons d'un pauvre organiste aveugle appelé « de Givet », dont on ne sait rien. Ses aptitudes étaient telles que, à dix ans, on le nomma organiste des Franciscains au couvent des Récollets, toujours à Givet.

En 1775, un musicien et organiste allemand de l'Abbaye de Schussenried, le moine Guillaume Hanser, fut engagé, par l'Abbé Remacle Lissoir, au Monastère de Laval-Dieu, non loin de Givet, pour y fonder une école de musique. Méhul devint son élève occasionnel, en contrepoint notamment, et son suppléant en 1778. Sur l'orgue de l'église du village qui est l'ancienne chapelle de l'Abbaye, on pouvait lire « Méhul a touché sur cet orgue sous le père Hanser moine et organiste de Laval-Dieu. » C'est pendant ce séjour que le musicien développa sa passion pour les fleurs et surtout pour la tulipe et la renoncule

Âgé de quinze ans en 1779, Méhul vint à Paris grâce à la générosité d’un mécène qui l’avait entendu à la tribune, armé d’une lettre de recommandation à l’intention de Gluck :

Il prit leçons chez Jean-Frédéric Edelmann, un claveciniste fort apprécié à Paris, installé depuis 1775, et lui-même ami de l’idole de Méhul, Gluck. Edelmann, d'origine strasbourgeoise, eut aussi Jean-Louis Adam pour élève et retourna dans sa ville natale dès la Révolution où il fut guillotiné à la fin de la Terreur en juillet 1794 comme robespierriste.
Dès son arrivée, Méhul assista à la première d’Iphigénie en Tauride et en fut très ému.

Ses premières armes de compositeur consistèrent à adapter des airs d’opéras populaires comme Thésée de Gossec. Une Ode sacrée de Jean-Baptiste Rousseau fut jouée au Concert Spirituel en 1782. La première composition publiée de Méhul fut un livre de trois sonates pour pianoforte en 1783 ; il avait tout juste vingt ans. En 1788, un nouveau recueil de sonates forme son opus II. Par ces publications, « Méhul s'imposait là comme l'un des meilleurs représentants de la première véritable école française de piano-forte… ».

En 1786, Méhul rejoint la loge maçonnique l’Olympique de la Parfaite Estime (constituée en 1782), dans sa partie musicale. En cela, il partage ce trait avec de nombreux musiciens de son siècle : Gossec, Cherubini, Devienne, Philidor, Pleyel, Saint-George, Viotti, etc. C'est dans cette loge que les symphonies parisiennes de Joseph Haydn furent interprétées (1787). Plus tard, il compose une musique de scène lyrique pour la Loge du Grand-Sphinx, dont il est membre, à l'occasion de la cérémonie funèbre du  de Henri Belleteste, membre de l'Institut d'Égypte.

Aidé et encouragé par Gluck, qui rend consciente sa vocation, Méhul envisage une carrière de compositeur dramatique. En 1785, l’écrivain Valadier lui offre le livret de Cora. Bien que présenté à l’Académie Royale de Musique, l’opéra ne sera monté que six ans plus tard.

À la même époque Méhul trouve, en la personne du librettiste François-Benoît Hoffmann, son collaborateur favori. Il donne le texte de son premier opéra représenté : Euphrosine, ou Le tyran corrigé. La première, à la Salle Favart le , fut un immense succès et a marqué le compositeur par le talent qu’on lui reconnut.

Sa carrière était lancée et c’était le début d’une longue relation avec le théâtre de la Comédie Italienne (renommé Opéra-Comique en 1793).

En dépit de l’échec de Cora, présenté seulement le , et de l’interdiction d’Adrien par la Commune de Paris pour raisons politiques en , Méhul a consolidé sa réputation avec des œuvres telles Stratonice (Favart, ) ou bien Mélidore et Phrosine (Favart, ).

Durant la Révolution, Méhul a composé de nombreux chants patriotiques et des pièces de propagande. Le plus célèbre étant le Chant du départ (1794) sur un poème de Chénier, qui est comme une seconde Marseillaise. L’engagement de Méhul fut récompensé par sa nomination à Institut de France en 1795, avec François-Joseph Gossec et André Grétry. La même année, il obtient un des cinq postes d’inspecteurs du Conservatoire de Paris, lors de sa fondation le 3 août, sous l'initiative de Bernard Sarrette, Capitaine de la Garde nationale. Le musicien en devint l'un des membres les plus dynamiques. Méhul est aussi « le plus important compositeur d’opéras en France pendant la Révolution8 ».

Dans la nouvelle institution, où il exerça jusqu'en 1816, il eut pour élève notamment Louis-Joseph-Ferdinand Herold.

Méhul était en bons termes avec Napoléon Ier : il devint l’un des premiers Français à recevoir la Croix de Chevalier de la Légion d'honneur (1804), en même temps que François-Joseph Gossec et André Grétry.

En 1807 il obtient le second Prix de Rome (le premier n’est pas décerné) avec une Cantate Ariane à Naxos. Ce prix est partagé avec Fétis.

Le succès des opéras de Méhul ne fut pas si grand aux débuts du xixe siècle qu’à la fin du xviiie siècle, cependant des œuvres tel Joseph (1807) furent célèbres. Le Premier Consul Napoléon, qui appréciait beaucoup la musique vocale, récompensera l’ouvrage. Deux arias notamment : Champs paternels, Hébron, douce vallée et À peine au sortir de l’enfance furent très populaires. L’opéra fit carrière à l’étranger, particulièrement en Allemagne.

En revanche, l’échec de son opéra Les Amazones en 1811 (présenté à l’Opéra le 17 décembre) fut un coup sévère et a clos sa carrière de compositeur pour le théâtre. Il prit alors une retraite bien méritée, dans sa maison de Pantin, pour cultiver « les œillets, les oreilles d'ours et surtout les renoncules, les jacinthes et les tulipes, ses fleurs les plus favorites » (Cherubini).

En dépit de ses liens avec Napoléon, la carrière musicale de Méhul ne pâtit point de la Restauration, d'autant qu'il sut ne pas se compromettre durant les Cent jours. Ainsi il est nommé au Conservatoire en 1816. Retiré un temps à Hyères entre janvier et mai pour y trouver un peu de repos et un soulagement à sa phtisie (tuberculose), le compositeur mourut de cette maladie à Paris le matin du , chez lui, no  28 rue de Montholon, âgé de 54 ans.

 

 

 

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