"La Femme sans Ombre" de Richard Strauss, 105 ans
Die Frau ohne Schatten, en français La Femme sans ombre, est un opéra en trois actes de Richard Strauss, sur un livret de Hugo von Hofmannsthal, créé en 1919 à Vienne.
Il a été créé le 10 octobre 1919 à l'Opéra de Vienne, avec Lotte Lehmann dans le rôle de la femme de Barak et Maria Jeritza dans celui de l'Impératrice, sous la direction de Franck Schalk, dans une mise en scène et des décors d'Alfred Roller, dont Strauss et Hofmannsthal ne furent pas satisfaits, « la nature “magique” et les extraordinaires difficultés de l'opéra » semblant avoir dépassé le metteur en scène.
Ces difficultés expliquent que l'opéra n'a pas été très souvent monté à ses débuts, en raison de l'obscurité supposée de son livret et de son « réel gigantisme : orchestre immense, et cinq voix hors classe ». Après l'avoir déjà repris à Vienne en 1943, à la fin de l'année 1955, le chef d'orchestre Karl Böhm l'inscrit au programme des galas de réouverture de l'Opéra de Vienne, dix ans après son bombardement, et le succès est tel que, dans la foulée, il en réalise le premier enregistrement discographique pour Decca, avec Leonie Rysanek (l'Impératrice), Hans Hopf (l'Empereur), Christel Goltz (la Femme), Paul Schöffler (Barak), Elisabeth Höngen (la Nourrice).
Herbert von Karajan s'attaque également à l’œuvre en la dirigeant, enregistrement à la clé en 1964, au Wiener Staatsoper, avec Jess Thomas, Leonie Rysanek, Grace Hoffman, Walter Kreppel, Walter Berry, Christa Ludwig, Lucia Popp, Fritz Wunderlich.
En France l'œuvre n'a été représentée qu'à partir de 1972.
Die Frau Ohne Schatten a connu un réel succès dans de nombreuses mises en scène et avec divers interprètes. Ainsi en est-il des représentations à l'Opéra de Paris Bastille en 2002 dans la mise en scène de Robert Wilson ou celles du Théâtre de la Monnaie en 2005, dans la mise en scène de Matthew Jocelyn et les costumes de Christian Lacroix, données après 37 ans d'absence, avec deux Barak célèbres en alternance avec les barytons José van Dam et Jean-Philippe Lafont. L'opéra national du Capitole à Toulouse a également donné une série de représentations en 2006, dans la mise en scène de Nicolas Joël, reprise en janvier et février 2024.
L'empereur des îles du sud-est a chassé une gazelle blanche qui s'est transformée en une belle femme sous ses yeux, à savoir la fille du roi fantôme Keikobad (d'après le souverain Key Qobad dans la mythologie persane). Il la désire et la prend pour épouse, mais parce que l'impératrice ne projette pas d'ombre, elle n'appartient pas pleinement au peuple, car l'ombre, la fertilité et l'empathie humaine sont une seule et même chose.
À ses côtés, la nourrice, qui déteste tout ce qui est humain, aime l'impératrice par-dessus tout. L'infirmière rapporte à propos de l'empereur : « C'est un chasseur et un amant, sinon il n'est rien ! (...) Ses nuits sont ses jours, ses jours sont ses nuits. »