Le Choix d’Hercule et le Dettingen Te Deum, stimulant écho du Festival Haendel de Göttingen
Georg Friedrich Haendel (1685-1759) : The Choice of Hercules, oratorio HWV 69. Dettingen Te Deum, HWV 283. Diana Moore, mezzo-soprano. Fflur Wyn, Rachel Kelly, soprano. Nathan Haller, ténor. Cody Quattlebaum, baryton-basse. Christ Church Cathedral Choir, dir. Stephen Darlington. FestspielOrchester Göttingen, dir. Laurence Cummings. Mai 2018. Livret en allemand, anglais ; paroles en anglais et traduction allemande. TT 49’11 + 37’38. 2 CDs Accent ACC 26415
Après une moisson d’opéras (Siroe, Faramondo, Agrippina, Lotario, Arminio, Rodrigo) et oratorios (Joshua, Susanna, Judas Maccabaeus, Brockes-Passion, Saül), le label Accent continue de diffuser les échos du Festival Haendel de Göttingen à travers ce double-album capté en public le 19 mai 2018. L’orchestre de circonstance est en grande forme, tel qu’on le vérifie dans la fanfare introduisant ce Te Deum écrit en 1743 pour célébrer sitôt la victoire des Autrichiens et Britanniques lors de la bataille de Dettingen. Le chœur de la Cathédrale Christ Church d’Oxford chante dans son jardin, empruntant honorablement dans ses rangs pour les solos, mais aurait mérité un surcroît de présence ; les voix d’enfants semblent un peu pâles, même si attendrissantes dans les (rares) moments d’ombre et recueillement (When thou hadst overcome the sharpness of death, et We therefore pray thee). Pour qui souhaite un chœur masculin, voici une enviable alternative à l’enregistrement de Stephen Layton avec les forces du Trinity College de Cambridge (Hyperion). Pour le soliste basse, plutôt que les intonations étranges de Cody Quattlebaum dans Vouchsafe O Lord, on pourra préférer Stephen Varcoe sous la conduite de Trevor Pinnock (Archiv, 1982), qui proposait un évident couplage (King shall rejoice) ici absent du programme.
Après les Hercule incarnés autour de 1980 par les contreténors Alain Zaepffel (avec un Max Pommer rigidifiant, pour Capriccio) et James Bowman (avec un Philip Ledger appliqué et sérieux chez Emi), voici le rôle confié à la mezzo Diana Moore, qui en rend compte avec autorité et un spectre corsé, perméable aux troublantes fragilités intérieures du personnage (Yet, can I hear). Le héros est tiraillé par le Plaisir de Fflur Wyn, alacre et tentatrice, que contrebalance la Vertu de Rachel Kelly, chaste voire austère, ce qui ne relève d’aucun contre-emploi. La brève apparition de l’Attendant de Nathan Haller traînaille hélas au gré de vocalises sans conviction. Les départs choraux un brin laborieux (While for thy arms) rappellent qu’il s’agit d’un live, sans qu’on ne succombe à une chaleur des plus agréables (admirable et touchant Virtue will place thee), et à une discipline collective qui demeure à haut niveau. Stephen Darlington inculque là encore à son orchestre un stimulant enthousiasme, tour à tour piquant ou smooth : il signe une interprétation sensible et équilibrée, où l’hédonisme comme le doute trouvent leur part, à l’instar des hésitations qui courtisent le demi-dieu dans cette fable morale. Au sein d’une discographie clairsemée et déjà ancienne, cette version impose ses atouts.
Son : 8,5 – Livret : 8,5 – Répertoire : 9 – Interprétation : 9
Christophe Steyne