Le Festival George Enescu à l'heure italienne et suisse

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Le Festival George Enescu, organisé de manière bisannuelle, est l’un des plus prestigieux festival d’Europe. Du 27 août au 24 septembre, les plus grandes phalanges européennes et roumaines vont venir à Bucarest pour donner de nombreux concerts. Cet évènement est l’un des plus importants dans son style en Europe. Le festival porte le nom du célèbre compositeur roumain. Un certain nombre de ses compositions seront entendues lors de ce festival.

Au programme de cette journée du 4 septembre, deux concerts : l’orchestre de chambre Cameristi della Scala de Milan et l’Orchestre de la Tonhalle de Zürich. Le premier concert a lieu dans l’Athénée Roumain tandis que le second a lieu dans la Salle du Palais, juste derrière le Musée National d'art de Roumanie.

L’orchestre de chambre milanais, composé de musiciens de l’Orchestre de la Scala de Milan, est dirigé par son chef invité principal, Wilson Hermanto. Ce dernier est accompagné par le violoncelliste allemand Daniel Müller-Schott ainsi que les lauréats du Concours International George Enescu 2022 (Ștefan Aprodu au violon et George Todica au piano). Les deux jeunes lauréats se produisent dans l’Aria et Scherzino de George Enescu. C’est une belle prestation qu’ils nous livrent, même si l’on sent que le jeu du jeune violoniste peut gagner encore en maturité et en uniformité dans le son. Les deux artistes proposent en bis une pièce courte mais très enjouée et virtuose. Le public est conquis par leur prestation. C’est désormais au tour de Daniel Müller-Schott d’entrer en piste pour deux pièces : Romance en Fa Majeur TrV 118 de Richard Strauss et Variations sur un thème Rococo Op.33 de Piotr Ilitch Tchaïkovsky. La Romance est un moment de grâce traversé par une partie plus animée et sombre. Le violoncelliste joue avec passion et musicalité. Dans Tchaïkovsky, chacune des variations a un caractère différent : tantôt mystérieux et intense, tantôt vif et joyeux. Le soliste démontre l’étendue de ses capacités dans ces deux pièces tout en étant accompagné avec attention par la petite phalange milanaise. 

Après la pause, place à une interprétation survoltée de la Troisième Symphonie en la mineur de Mendelssohn, dite « écossaise ». De manière générale, les tempi sont assez rapides à l’instar du premier mouvement. Dès le début, on sent une énergie débordante. Cela a un impact sur l’échelle des nuances qui s’en retrouve quelque peu réduite. Soulignons tout de même l’engagement avec lequel les musiciens jouent et vivent avec passion cette très belle œuvre de Mendelssohn. Notons par exemple le solo brillant de la clarinette au début du deuxième mouvement. De son côté, Wilson Hermanto guide avec enthousiasme et précision l’orchestre de chambre Cameristi della Scala.

Le concert du soir est assuré par l’orchestre de la Tonhalle de Zürich sous la direction de son directeur musical, Paavo Järvi. Nous retrouvons en soliste le talentueux violoncelliste roumain Andrei Ionita. Le concert s’ouvre avec une pièce d’Arthur Honegger : Pacific 231. Mouvement Symphonique No. 1. Cette œuvre, relativement peu jouée met en avant la composante rythmique plutôt qu’une mélodie. L’interprétation de cette première œuvre est assez impressionnante et donne le ton de la soirée. 

Après cette mise en bouche, place à Andrei Ionita dans la Symphonie Concertante en si mineur Op. 8 de George Enescu. Le soliste livre une prestation musicale de très haut niveau avec des contrastes, de la précision mais aussi avec passion et engagement. L’orchestre et Paavo Järvi sont tout autant engagés et attentifs au violoncelliste afin de l’accompagner au mieux. Le public est subjugué par cette prestation et se verra d’ailleurs gratifié de trois bis : un premier avec orchestre, un second complètement déjanté d’un compositeur suédois et, pour finir en douceur, la Sarabande de la Suite N°1 pour violoncelle de Jean-Sebastien Bach.

Au programme de cette deuxièmes partie, une symphonie qu’on ne présente plus et qui est connue d’un très grand nombre de mélomanes : la Symphonie N°9 en mi mineur Op.95, dite « Symphonie du Nouveau Monde » d’Antonin Dvořák. C’est une exécution du plus haut niveau qui nous est livrée ce soir. L’échelle des nuances qu’utilise l’orchestre est juste hallucinante. Le son d’ensemble des cordes est d’une homogénéité assez rare et permet d’obtenir des pianissimi à peine audible, ce qui n’est pas une mince affaire au vu de l’effectif des cordes. Les tempi sont judicieusement choisis et donnent perpétuellement du mouvement à l’œuvre. Paavo Järvi, qui dirige de mémoire, sait très bien ce qu’il veut entendre et faire ressortir. On sent une connaissance profonde de la pièce avec des idées claires, précises et parfois même innovantes. Le célèbre solo de cor anglais du deuxième mouvement tient toute la salle en haleine tandis qu’un flot d’énergie s’empare de l’orchestre lors du troisième mouvement. Le dernier mouvement clôture en beauté cette Symphonie du Nouveau Monde. Le public est complètement sous le charme de cette prestation et ne manque pas d’applaudir plus que copieusement les artistes et en réservant une standing ovation. En bis, nous aurons droit à une valse assez tranquille pour clôturer de manière agréable cette magnifique soirée.

Bucarest, Athénée Roumain et Grand Hall Palace, 4 septembre 2023

Thimothée Grandjean, Reporter de l’IMEP

Crédits photographiques :  Kaupo Kikkas

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