Les neuf concertos pour cordes de Durante, rendus à leurs fins linéaments

par

Francesco Durante (1684-1755) : Concerti per archi 1-9. Nicola Fiorenza (c1700-1764) : Sinfonia pour quatre violons et continuo en ut mineur. Nicola Porpora (1686-1768) : Concerto pour violoncelle, cordes et continuo en la mineur. Accademia dell’Annunciata. Riccardo Doni, direction, clavecin, orgue positif. Carlo Lazzaroni, Angelo Calvo, violon. Archimede De Martini, alto. Marcello Scandelli, Carlo Maria Paulesu, violoncelle. Paolo Bogno, violone. Elisa La Marca, théorbe, guitare. Octobre 2021 & Mai 2022. Livret en anglais, français, italien. TT 63’54 + 53’27. Arcana A540

Cet album rappelle combien ces concerti a quattro de 1730-1740 sont « l’une des preuves les plus significatives de l’extraordinaire vitalité de la musique instrumentale napolitaine au XVIIIe siècle », selon la notice de Guido Olivieri. Une sorte de trait d’union entre la sonate d’église, le concerto vénitien et la naissante manière galante. Un riche laboratoire de textures et d’ambiances où le contrepoint, l’écriture en canon d’ancienne mode, croisent des cantabile, des affettuosos, des amorosos et même des menuets.

Voilà soixante ans, I Musici invitait le premier concerto du lot, en fa mineur, au sein d’un vinyle Philips consacré à l’École de Naples ; le Collegium Aureum en invitait trois autres (Harmonia Mundi). Voilà quarante ans, Claudio Scimone et ses Solisti Veneti enregistraient le fantasque La Pazzia en la majeur en exergue d’un vinyle lui aussi dédié au baroque de la cité parthénopéenne ; l’ensemble La Follia conviait trois autres concertos sous étiquette Arion. Il fallut attendre l’équipe du Concerto Köln captée en mai 1990 pour que le mélomane dispose de huit concertos, que le label Capriccio a réédités en SACD. Pour Brilliant en juin 2016, Cristina Corrieri leur adjoignit un concerto en si bémol majeur dont seule une source (Conservatoire de Gênes) garde la trace. Au sein de la discographie, la proposition de l’Accademia dell’Annunciata apparaît donc comme la seconde intégrale de ces neuf concertos.

Une prise de son plutôt plate et globalisante tend à laquer ces polyptiques que l’orchestre de Riccardo Doni pigmente finement. Quelques atmosphères semblent émaner des lagunes du Prete Rosso. Quitte à paraître un peu savonnées (Ricercar du concerto no 4). Avouons que l’on aurait aimé çà et là quelques empoignades plus farouches, et une caractérisation qui questionnât plus ouvertement l’invention et la fantaisie de ces pages. Les amateurs d’articulation fracassante en seront pour leurs frais : l’énergique prestation (l’effervescent Presto du concerto no 5 !) lisse les attaques et les reliefs dans une étoffe onctueuse, délicatement spumescente (Minuet du concerto no 6), tirée à quatre épingles même quand elle s’ébroue (la guitare d’Elisa La Marca dans le Presto du Concerto no 3, et son finale à la pointe sèche). 

Mais aucune critique ne compromettrait cette fine interprétation, alignant des tableautins fignolés au pinceau de soie. Une Sinfonia de Nicola Fiorenza et un concerto de Nicola Porpora, défendu avec vaillance par Marcello Scandelli, complètent ce subtil théâtre d’archets, enviable référence pour les concerti de Durante, -en concurrence avec le geste plus dramatique et densément sculpté du Concerto Köln.

Christophe Steyne

Son : 7 – Livret : 9 – Répertoire : 8 – Interprétation : 9

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