Mais encore : "French touch" symphonique à travers le monde
Quelques disques mettent à l’honneur des compositeurs français par des interprètes établis un peu partout à travers le monde.
Claude Debussy (1862-1918) : Printemps, Rapsodie pour orchestre et saxophone ; Marche écossaise sur un thème populaire ; Berceuse Héroïque ; Deux Danses ; Nocturnes. Claude Delangle, saxophone ; Gulnara Mashurova, harpe ; The Philharmonic Chamber Choir of Europe, Singapore Symphony Orchestra, Lan Shui. 1 CD BIS. BIS-2232.
On commence ce parcours par ce bel album Debussy par l’Orchestre Symphonique de Singapour sous la baguette de Lan Shui. Il s’agit du troisième volume que ce tandem consacre à l’oeuvre symphonique de Claude Debussy. On aime le sens narratif du chef et les belles couleurs et la précision de la phalange asiatique. Certes dans Printemps et Nocturnes, il existe des versions plus qualitatives : Boulez (DGG), Dutoit (Decca) ou Abbado (DGG) et Celibidache (DGG) dans les seuls Nocturnes, mais on apprécie le sens naturel de ces gravures. Notons que ce disque met aussi à l‘honneur la belle et rare Rapsodie pour orchestre et saxophone avec l’excellent Claude Delangle en soliste.
Avec ce disque, Lan Shui clôt son beau parcours discographique pour Bis au pupitre d’un orchestre qu’il a placé sur la carte des formations symphoniques mondiales. La prise de son “Bis” n’est pas pour rien dans la réussite technique de leurs enregistrements.
Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Symphonie n°3 en ut mineur, Op.78 ; Francis Poulenc (1899-1963) : Concerto pour orgue, cordes et timbales en sol mineur ; Charles Marie Widor (1844-1937) : Symphonie pour orgue n°5 : Toccata. Christopher Jacobson, orgue ; Orchestre de la Suisse romande, Kazuki Yamada. 1 CD Pentatone PTC 5186 638.
Le chef d’orchestre Kazuki Yamada continue son aventure discographique avec l’Orchestre de la Suisse Romande pour Pentatone. Tout le savoir-faire technique de ce label hifiste est convoqué pour faire de cet album une réussite au niveau du son dans un programme orgue et orchestre de démonstration. La précision de la baguette de Kazuki Yamada est connue et elle fait mouche dans ces oeuvres cernées avec puissance. Cela réussit plutôt bien à la Symphonie n°3 de Saint-Saëns et moins bien au Concerto de Poulenc traité avec trop de sérieux, y compris par l’organiste Christopher Jacobson. Les férus de musique française regretteront la neutralité de l’Orchestre de la Suisse Romande qui sonne sans personnalité et qui a perdu ses belles couleurs de l’époque Armin Jordan (sans remonter à Ansermet !).
Pour la Symphonie n°3 avec orgue, la référence est l’enregistrement de Pascal Rophé avec l’Orchestre Philharmonique Royal de Liège (Cyprès) alors que pour Poulenc on chérit toujours la version de Marie-Claire Alain et Jean Martinon (Erato).
Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Symphonie n°2 en la mineur ; Danse Macabre ; Symphonie en fa majeur Urbs Roma”. Utah Symphony, Thierry Fischer. 1 CD Hyperion. CDA68212.
On reste avec Saint-Saëns pour un nouveau volume de l’intégrale des symphonies par Thierry Fischer et son orchestre de l’Utah pour Hyperion. Le mélomane est ravi de trouver la rare Symphonie “Urbs Roma”, quasi contemporaine de la Symphonie n°2 également présente sur ce disque. Thierry Fischer connaît parfaitement le style de cette musique et il allie la précision de style à la légèreté du ton. On est ici dans un certain académisme musical mais avec un côté typiquement français dans la gestion allégée de la masse orchestrale. L’orchestre de l’Utah est excellent dans ses couleurs et son adaptabilité.
À part les antiques versions de Jean Martinon (Warner), on n’a pas mieux dans ces oeuvres, certes secondaires mais attachantes.
Hector Berlioz (1803-1869) : Symphonie fantastique, Op.14 ; Lélio ou Le retour à la Vie, Monodrame lyrique, Op.14b. Jean-Philippe Lafont, narrateur ; Cyrille Dubois, ténor ; Florian Sempey, baryton ; Ingrid Marsonier, piano ; Wiener Singverein ; Wiener Symphoniker, Philippe Jordan. 2 CD Wiener Symphoniker. WS 020
Alors que nous sommes déjà en juin, on ne peut pas dire que les nouveautés de l’année Berlioz encombrent les rubriques discographiques. On attendait avec impatience cette nouvelle sortie de l’excellent Philippe Jordan qui couple la Symphonie fantastique à Lélio ou Le retour à la vie. Dans la “Fantastique”, Philippe Jordan cherche à alléger les textures en favorisant une pointe sèche qui radiographie les pupitres. L’impact nerveux est grand mais cela manque parfois d’épaisseur, de puissance révolutionnaire ou de passion brute. Complément logique, Lélio a rarement les honneurs du disque et du concert. Il faut dire que sa structure hybride qui mixe narration, chant, piano, orchestre et choeur est redoutable à unifier. Rompu au monde de l’opéra, Philippe Jordan sait rendre justice aux thèmes et aux ombres de la partition, galvanisant les forces vocales et instrumentale. On note la présence d’un narrateur inattendu : le baryton Jean-Philippe Lafont. Pour Lélio, cette captation de concert est la référence avec celle de Martinon (Warner). On regrette juste que la “Fantastique” soit plus conceptuelle que musicale.