Melinda Maxwell mélange contemporain et jazz, notation et improvisation
Janus. Melinda Maxwell (1958-). Melinda Maxwell ; Callum Armstrong ; Oliver Janes ; Percy Pursglove ; Julian Warburton ; Liam Halloran ; James Dooley ; Sebastiano Dessanay. 48’33" – 2023 – Livret : anglais. Birmingham Record Company. BRC020.
Deux pièces nées de l’imagination de Melinda Maxwell font ce disque publié chez Birmingham Record Company, curieux mélange de tendances contemporaines s’encanaillant dans le jazz, tout en cultivant une complexité sous-jacente, comme dissimulée, y compris dans les moments plus libres ou improvisés – qu’on distingue difficilement des parties écrites tant équilibre et timing y sont préservés. La compositrice britannique est également une soliste (et enseignante) à la pratique intense et, au hautbois, son instrument de tous les jours, elle ajoute ici, pour Janus, épique morceau titulaire de 36 minutes, le nadhaswaram, sorte de hautbois indien long de 90 cm, sonore, criard même, qui fait parfois penser au clairon, et l’antique et grec aulos, instrument à vent à anche battante, simple ou double, parfois appelé double flûte en raison de ses deux tuyaux, pas si simple à apprivoiser et au son de base, induit dès l’embouchure, à la personnalité schizophrène, éclatée en deux tendances antinomiques, par lesquelles douceur et flexibilité se chamaillent avec raucité et sauvagerie. La composition phare convoque également, outre les instruments précités, clarinette, trompette, contrebasse, électronique et percussions, tenus par instrumentistes de formation classique ou des pros de l’impro, en une alliance de deux mondes où Maxwell, qui la cultive depuis une dizaine d’années et sa participation au MMus in jazz performance au Royal Birmingham Conservatoire, façonne une nouvelle raison d’être au hautbois (et à ses acolytes).
Le triptyque Hecate, qui se limite à l’aulos, la contrebasse (Sebastiano Dessanay) et la percussion (Liam Halloran), rassemble trois passages choisis d’improvisation live, un espace « amusant, risqué, inspirant [… qui] ressemble à un retour spirituel aux sources, […] un lieu qui célèbre l'imagination, pardonne les erreurs et applaudit l'expérimentation », que la compositrice expérimente de plus en plus, avide de liberté et convaincue d’y trouver de quoi nourrir les autres pans de sa création musicale : ici, pas de parties notées, l’improvisation est libre et propose une façon différente (complémentaire) d’aborder l’univers sonore de l’aulos. J’y préfère Janus, plus construit (bien sûr), plus abouti et plus captivant, une composition dont le mélange des genres peut dérouter mais à la qualité et à l’originalité bienvenues.
Son : 6 – Livret : 6 – Répertoire : 7 – Interprétation : 7
Chronique réalisée sur base de l'édition digitale.
Bernard Vincken