Première Symphonie d’Hans Rott magnifiée par Jakub Hrůša. Justice est faite !
Hans Rott (1858-1884) : Symphonie en mi majeur - Gustav Mahler (1860-1911) : Andante allegretto (Blumine) - Anton Bruckner (1824-1896) : Symphonisches Prélude en ut mineur. Bamberger Symphoniker, direction : Jakub Hrůša. 2011. 70’. Deutsche Grammophon 4862932.
Un Mahler peut en cacher un autre ! Ou plutôt Hans Rott, c’est Mahler avant Mahler. Une sorte de Jean le Baptiste annonçant la venue de son prochain, le grand Gustav.
Quel choc que cette redécouverte de sa Première Symphonie datant de 1878 et pourtant la discographie est abondante depuis les trente dernières années avec notamment le pionnier Gerhard Samuel (Hyperion) ou plus récemment l’excellent Paavo Järvi (RCA). Le mérite en revient au chef tchèque Jakub Hrůša et au Bamberger Symphoniker qui nous entraîne avec dynamisme dans un impressionnant monde aux confins de Mahler donc, mais aussi de Bruckner, le maître de Rott. On entend même quelques sonorités dignes de Bedřich Smetana, sans doute l’héritage de Hrůša , bref nous sommes aux anges !
« La brièveté est sœur du talent. » disait Anton Tchekhov. On tient presque l’épitaphe du pauvre Rott mort trop tôt à l’âge de seulement 25 ans emporté par sa folie. Décidément, les meilleurs partent les premiers. La réussite de cet album est à la hauteur de la partition, de ce chef-d'œuvre resté trop longtemps dans l’ombre. En effet, en 1989 il n’y a pas que le Mur de Berlin qui tomba cette année-là mais aussi celui de notre ignorance… près de cent ans ! Nous devons une fière chandelle au musicologue Paul Banks qui exhuma cette Symphonie en mi majeur totalement hors normes pour son époque dans les archives de la Bibliothèque Nationale autrichienne à la fin des années 1980.
Rott est une sorte de chaînon manquant au sein de la composition symphonique, élève de Bruckner, camarade de conservatoire de Mahler à Vienne. Pendant près d’une heure nous avons l’impression d’entendre une Symphonie ’0’ de Mahler d’inspiration wagnérienne.
Mais celui qui parle le mieux d’Hans Rott, c’est Mahler lui-même : « Ce que la musique a perdu avec lui est incommensurable : son génie s'envole tellement haut, déjà dans sa première symphonie, qu'il a écrite lorsqu'il était un jeune homme de vingt ans et qui fait de lui -le mot n'est pas trop fort- le fondateur de la symphonie nouvelle, comme je la comprends. »
Deutsche Grammophon a eu la brillante idée de rassembler pour la postérité les trois comparses, en complétant ce CD avec le mouvement Blumine de Mahler et le Prélude symphonique en ut mineur de Bruckner.
Sûrement LE disque symphonique de cette fin d’année que nous recommandons vivement. Indispensable pour tous les mahlériens qui se respectent.
Son : 10 Répertoire : 10 Interprétation : 10
Bertrand Balmitgere