Rencontres musicales d’Évian 2024, Féerie entre lac et sommets

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Les Rencontres Musicales d’Évian 2024 anticipent l’éclat de la programmation à venir, étendue sur toute l’année, en concluant la saison avec l’« Apothéose de l’orchestre », c’est à dire, la  Bacchanale de Daphnis et Chloé

Le dernier accord à peine dissipé, le public debout acclame les musiciens des «  Siècles » et son chef, Louis Langrée. « Le plus beau concert de la Saison ! » commentent les festivaliers ravis. Il faut dire que l’ensemble et le chef français sont rompus aux finesses comme aux rutilances de Ravel. Sous les poutres de l’immense datcha, devant la féerie de bouleaux et de cristaux, les Contes de Ma Mère l’Oye (Cinq pièces enfantines suivis de la Seconde suite orchestrale de Daphnis et Chloé touchent à la perfection. « La grandeur dans le simple » s’exclamait Eric Satie à propos des Contes de Ma Mère l’Oye. Ici, le chef et ses musiciens respirent avec la musique de Ravel soulevant ces houles chatoyantes, caressantes où se glissent avec une infinie délicatesse les plus touchantes émotions (métamorphose de la Bête en Prince par exemple).

En première partie, le jeune violoniste suédois d’origine russe, Daniel Lozakovich donnait une réplique magistrale à la même formation dans le 3e concerto de Saint Saëns, et offrait, en bis , la vertigineuse 3e sonate d’Ysaÿe puis la mélodie de Fauré, « Après un rêve », quelque peu alanguie. Hommage discret à l’heureuse programmation de plusieurs concerts Fauré.

La veille, Alexandra Dovgan, le Quatuor Modigliani et Béatrice Rana parcouraient des terres plus rudes, parfois mélancoliques, voire anguleuses. 

Contrôle de la rapidité, naturel du phrasé, mise en valeur des plans sonores, galbe du phrasé, exactitude d’un toucher aussi onctueux que délicat... toutes qualités qui font de la jeune pianiste russe, d’à peine 18 ans, un talent déjà accompli et récompensé. Son programme, allant de Schumann (Sonate pour piano N° 2) à Rachmaninov (Variations sur un thème de Corelli) puis Scriabine (Sonate-Fantaisie N°2) en passant par Bach (Partita n°3 transcrite par Rachmaninov), mélangeait rigueur et poésie de l’ombre. Penchée sur son instrument, petite fée au visage d’icône, elle semblait toute entière absorbée par les magies délectables ou obscures qu’elle faisait naître. Une musicienne singulière à qui tous les possibles ouvrent les bras.

Le quatuor Modigliani, enfin, après l’« exercice de style » des Trois pièces de Stravinsky pour Quatuor à cordes, abordait avec une telle intensité le Quatuor  N°7 de Beethoven et son poignant thème russe que l’alto en brisait une corde. Enfin, la pianiste Béatrice Rana, d’un jeu bien timbré apportait éclat et précision au Quintette en sol mineur op. 57 de Chostakovitch.

De nouvelles structures (loges, salle) sont en train de voir le jour autour du berceau de la Grange au Lac. Elles vont venir embellir et enrichir ce festival  d’excellence, servi par une organisation aussi efficace que sympathique, sans oublier les nombreux bénévoles et acteurs de la vie locale.

Bénédicte Palaux Simonnet

juillet 2024, Evian les bains

Crédits photographiques : Irina Schymchak

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