Scharwenka méritait mieux

par

Franz Xaver Scharwenka (1850-1924)
Intégrale des Concertos pour piano
Alexander Markovitch, Orchestre Symphonique National d'Estonie, dir. : Neeme Järvi
2014 – DDD – 2CD : 68'35'' et 71'35'' – Textes de présentation en anglais, allemand et français – Chandos CHAN 10814(2)

Le parcours du compositeur Franz Xaver Scharwenka, né dans une région de Pologne alors annexée par la Prusse, n'est pas sans rappeler celui de son contemporain Glazounov. A la fois pianistes, compositeurs et chefs d'orchestre, tous deux se sont progressivement détournés de ces activités au profit de la pédagogie : il faut dire qu'il n'était pas facile, en ce tournant de siècle, de défendre un style romantique qui perdait du terrain. C'est ainsi que, en dépit de l'estime généralisée dont ils jouissaient de leur vivant, on les a un peu oubliés depuis. De Scharwenka, hormis quelques pièces de genre, seuls les quatre concertos pour piano ont traversé l'Histoire. Il est vrai que ce sont des merveilles ; alliant un classicisme brahmsien à une virtuosité à la Liszt (le dédicataire du premier concerto), ils intègrent en outre de nombreux éléments de folklore slave stylisé. La présente intégrale est la première au disque, aucun pianiste n'ayant eu jusqu'alors le courage de s'attaquer simultanément à de tels monuments de virtuosité. Alexander Markovitch relève le défi avec fort peu de conviction : virtuose, certes, ses doigts enchaînent les traits les plus brillants avec une indifférente bonhomie. Où sont la fraîcheur, le lyrisme, l'espièglerie de cette musique ? L'orchestre, pour sa part, ne manque ni de fougue ni de noblesse ; malheureusement, la prise de son le place fort en-deçà du piano, ce qui devient vite étouffant. La notice de présentation, sommaire, comporte des imprécisions : Scharwenka se serait inspiré d'un Prélude de Rachmaninov... avant qu'il ne fût écrit! Les enregistrements de Earl Wild et de Stephen Hough, entre autres, rendent grâce à ces concertos avec bien plus de finesse. Car Scharwenka vaut réellement la peine d'être (re)découvert !
Quentin Mourier

Son 4 – Livret 2 – Répertoire 9 – Interprétation 4

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