La femme n’est que le gracieux perroquet des imaginations, des pensées, des paroles de l’homme, et le joli petit singe de ses goûts et de ses manies.
C’est notamment ainsi que le Français Edmond Huot de Goncourt (1822-1896), fondateur de l’Académie Goncourt, considère la « femme » dans son Journal, le 25 janvier 1890.
Juliette Folville est une preuve, parmi bien d’autres, de l’inanité de cette citation.
Eugénie Emilie Juliette Folville est née à Liège le 5 janvier 1870. Son père Jacques Hubert Louis Jules Folville, connu sous le prénom de Jules, est un avocat renommé né à Liège le 13 octobre 1827. Il y a épousé en 1868 la Liégeoise Emilie Joséphine Eugénie Ansiaux, née le 19 février 1835, connue sous le prénom d’Emilie, une musicienne de talent, mais « sans profession ». Son grand-père maternel, Emile Louis Ansiaux (1804-1874), un banquier nommé Chevalier de l’Ordre de Léopold, a été juge puis président du tribunal de commerce de Liège. Lors de la naissance de leur fille unique, les parents de Juliette étaient domiciliés 7, rue Lonhienne à Liège et la famille y a vécu, au moins jusqu’au décès de Jules (27 novembre 1890).
Famille
Juliette, enfant unique,est élevée dans une famille de mélomanes, musiciens amateurs de haut niveau. Sa mère Emilie Ansiaux(1835-1929) chante très bien, notamment des œuvres de Jean-Théodore Radoux (1835-1911), directeur du Conservatoire Royal de Musique de Liège de 1872 à 1911. Son père, l’avocat Jules Folville(1827-1890), a suivi, au Conservatoire Royal de Liège, les cours de piano de l’excellent professeur Jules Jalheau (1798-1862), né à Bruxelles de parents liégeois. Ce dernier a été professeur de solfège au Conservatoire de Paris avant d’être appelé, dès 1827, à l’Ecole Royale de Musique et de Chant de Liège nouvellement fondée et qui deviendra le 10 novembre 1831, dès l’indépendance du pays, le premier Conservatoire Royal de Musique de Belgique. Ami de Franz Liszt et adepte de méthodes nouvelles, il y a contribué à la formation de pianistes de valeur comme César Frank (1822-1890). En 1860, il est devenu Chevalier de l’Ordre de Léopold.
Crescendo-Magazine reprend un dossier consacré à l'école belge de violon publié en avril 2002 sous la plume de Michele Isaac.
Parmi les nombreux violonistes liégeois, on retiendra plus particulièrement les noms de Vieuxtemps, Léonard et Prume. Porte-étendards d’un style à nul autre pareil, ils font la renommée de leurs maîtres mais imprègnent durablement la postérité musicale. Alors que la symbiose des apports français, italien et allemand a mûri pour donner un style particulier, l’École liégeoise du violon se distingue par l’ampleur du son (l’archet semble ne jamais finir), la variété de la sonorité produite, la grande sûreté de la main gauche, la légèreté, la variété des coups d’archet, l’éloquence véhémente de son interprétation. D’autre part, force est de constater que ce qui définit avant tout cette école, c’est son homogénéité. Se transmettant respectueusement les valeurs d’un enseignement de grande qualité, les violonistes liégeois demeurent les garants d’une tradition qui ne s’affaiblira qu’au début du XXe siècle.
Henri Vieuxtemps
Comme on l’a dit précédemment, Henri Vieuxtemps se démarque d’un des ses maîtres, de Bériot, par l’interprétation de son Premier Concerto -véritablement déconcertant! Rencontrant durant sa carrière des célébrités telles que Ludwig Spohr et Robert Schumann, le Verviétois incarne le musicien-virtuose parfait, infatigable itinérant et perfectionniste. Après des tournées en Europe et aux États-Unis, il se tourne vers la Russie où il accepte la fonction de soliste du Tsar à Saint-Pétersbourg. C’est grâce à Bèze-Kirsty, élève de Hubert Léonard à Bruxelles, et plus tard de Simon Mauhin de Verviers, professeur à Saint-Pétersbourg de 1887 à 1917 qu’une partie de l’École russe actuelle se rattache à la branche belge.
Suite des portraits de compositrices du XIXe siècle avec Louise Héritte-Viardot, fille aînée de Pauline Viardot.
A l’époque de Louise Héritte-Viardot, l’art, et en particulier la composition, sont des bastions masculins. La citation suivante est éclairante à ce sujet.
Dans un transport d’admiration, Camille Saint-Saëns se serait un jour exclamé, : Quelle bévue a commise le bon Dieu lorsqu’il a fait de Louise une femme ! Elle possède les dons naturels, l’intelligence éclairée, la largeur de vues, l’érudition et la force de caractère d’un homme vraiment supérieur. Et comme artiste ! Et comme compositeur ! (…) Quelle inspiration, quel talent, quelle puissance, quelle technique, quel profond savoir, quelle originalité (parfois subversive) se dégagent de chacune de ses œuvres ! Réellement, le bon Dieu s’est étrangement trompé, car si Louise était un homme, son génie produirait, dans la musique, une véritable révolution.
Comment a résisté cette femme portant aussi le poids d’un héritage familial hors normes ?
L’enfance
Louise Pauline Marie Viardot (Paris 14 décembre 1841 – Heidelberg 17 janvier 1918) est la fille aînée de Pauline et Louis Viardot. Son enfance l’a bouleversée et a marqué toute sa vie. Pauline, sa maman qui vient de se marier, doit se faire connaître aussi bien en France, où la concurrence est rude, qu’à l’étranger. Il est difficile pour une cantatrice de se faire un nom, surtout si elle doit se différencier d’une sœur décédée au sommet de son talent. Au début, la comparaison avec sa sœur Maria Malibran est oppressante. Elle a 20 ans quand naît Louise. Dans ses lettres, elle écrit qu’elle se désole de ne pas voir Louisette, de ne pas être présente pour lui faire des câlins ou l’embrasser le soir. Elle n’a pas le choix. A ce moment, pour elle et son mari, la vie est une perpétuelle course à travers l’Europe. La carrière prime et les parents ne renoncent à rien pour Louise. Elle le leur reprochera toute sa vie, persuadée, de plus, que si ses parents la délaissent, c’est parce qu’elle n’est qu’une fille !