Un Ballo in Maschera à Orange: le triomphe d'Anne-Catherine Gillet

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Après le succès remporté par l’ouvrage de Wagner, l’on pouvait espérer un résultat tout aussi probant pour celui de Verdi qui fait partie du répertoire courant d'Orange. Mais la déception a été grande : elle est due à la mise en scène de Jean-Claude Auvray qui se contente d’une simple mise en place. La scénographie de Rudy Sabounghi ne consiste qu’en tabourets recouverts de velours bleu, alors que les costumes de Katia Duflot métamorphose la Cour de Gustave III de Suède en un mess d’officiers, n’arborant que des couleurs sombres, tout comme la sorcière Ulrica et le page Oscar ; le blanc, symbole d’innocence, est réservé à la seule Amelia ; et il faut attendre la scène du bal pour voir la trame prendre du relief, alors que tous les participants revêtent des tuniques de velours bleu sombre ou jaune vif sous des perruques et masques poudrés. Sous la direction enflammée d’Alain Altinoglu, les formations chorales d’Angers-Nantes, Avignon, Nice et Orange montrent une cohérence que ne peut revendiquer l’Orchestre National Bordeaux-Aquitaine, incapable de voiler la faiblesse de certains de ses pupitres. Sur le plateau, le ténor mexicain Ramon Vargas incarne Riccardo en négociant avec un style irréprochable un rôle dont il n’a pas l’ampleur dramatique, ni la générosité de moyens. Par son émission engorgée et la pauvreté du coloris, Lucio Gallo n’est qu’un piètre Renato, face aux machiavéliques conspirateurs Samuel et Tom que présentent Nicolas Courjal et Jean Teitgen. Les voix féminines sont beaucoup plus convaincantes : Kristin Lewis est une Amelia impressionnante par l’ampleur des moyens sur une tessiture large, extrêmement éprouvante, tandis que Sylvie Brunet-Grupposo a la noirceur de timbre d’une sorcière se livrant à ses incantations. Et la triomphatrice de la soirée est Anne-Catherine Gillet qui a l’exubérance du page Oscar par la brillance de son soprano léger.
Paul-André Demierre
Orange, Théâtre Antique, le 3 août 2013

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