Vertigineux voyage d'un millénaire à l'autre 

par

Hildegard VON BINGEN (1098-1179)
Petter Udland JOHANSEN (°1971)
Petrus ABAELARDUS (1079-1142)
Vox cosmica, Responsorium et séquences
Arianna SAVALL, Petter Udland JOHANSEN, Andreas SPINDLER, Anke SPINDLER, David MAYORAL
2014-78'18- présentation, livret et textes en allemand et anglais-chanté en latin-Carpe Diem Records CD 16304

A côté des 5 pièces d'Hildegard von Bingen, (1098-1179) on a joint un très belle séquence de Pierre Abélard son presque contemporain (1079-1142), l'un et l'autre figures de proue en ce XII ème siècle si riche en tous domaines (poésie, musique, architecture...). A côté, bien intercalées, quatre « méditations » du norvégien Petter Udland Johansen né en 1971 qui, avec tact, nous invite précisément à travers ses propres réflexions, à prolonger l'émotion ressentie à l'écoute de la grande Hildegard. Ces moments d'émotion sont-ils bien réalisés et le but est-il atteint ? On en doute en peu. D'abord, car l'introduction de « méditations » modernes au milieu d'ouvrages écrits au XII ème siècle peut sembler artificiel : comme si l'auteur se faisait plaisir à lui-même. On éprouve un rien de retenue et on en arrive à penser que les quatre interprètes servent moins Hildegard von Bingen qu'il ne s'en servent. D'ailleurs la dernière ligne de la p. 3 du livret conforte cette impression puisqu'on y lit que les « arrangements musicaux sont dus à A.Savall et P.U. Johansen »... Et pourtant, comment ne pas être touché dès le premier Responsorium « O tu suavissima virga » et l'Antienne « Karitas habundat » où une interminable teneur (fa) tend la pièce de la première à la dernière note : un admirable exemple d'écriture « monastique ». Dans la belle famille catalane Savall Figueras, Arianna s'impose par ses talents musicaux multiples et par sa voix qui s'affirme, claire et lumineuse. Les accompagnements d'instruments anciens des plus variés (des harpes médiévales aux trompes marines ou aux bols tibétains) sont bienvenus. Il reste, de ce vertigineux voyage d'un millénaire à l'autre, le sentiment général d'un univers extrêmement dépouillé parfois ardu où l'oxygène se fait rare, et puis, le regret qu'il s'agisse là... d'arrangements.
Bénédicte Palaux Simonnet

Son 9 - Livret 5 - Répertoire 6 - Interprétation 7

 

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