Répertoires russes avec  Arvīds Jansons et Constantin Silvestri 

par

Piotr Ilitch Tchaïkovsky (1840-1893) : La belle au bois dormant, Op.66 (extraits) ; Francesca da Rimini, Op.32 ;  Symphonie nᵒ 5 en mi mineur, op. 64 ; Serge Prokofiev (1891-1953) : Symphonie n°1 en ré Op.25 “classique”). Orchestre philharmonique de Leningrad, Arvīds Jansons. 1971 et 1983. Livret en : anglais, allemand et français.103’23’’. ICA LC 5177 

Dmitry Kabalevsky (1904-1897) : Colas Breugnon, ouverture ; Dmitri Chostakovitch (1906-1975) : Symphonie n°8 en Ut Mineur, Op.85. Bournemouth Symphony Orchestra, Constantin Silvestri. 1961. Livret en :  : anglais, allemand et français. 62’54’’. ICA LC 5176

Si la figure de Mariss Jansons est inscrite au panthéon de la musique, celle de son père Arvīds Jansons (1914-1984) reste très marginalement connue. Il faut dire que malgré le brio de sa carrière, elle se réalisa plutôt dans l’ombre du grand Evgueni Mravinski, comme chef d’orchestre associé auprès de l’Orchestre philharmonique de Leningrad, poste qu’il partagea un temps avec Kurt Sanderling. Cette carrière menée derrière le rideau de fer, s'entrouvre à l’international  dans les  années 1960, au paroxysme de la guerre froide, avec un poste de premier chef invité à l'orchestre Hallé de Manchester. C’est d’ailleurs au pupitre de cet orchestre qu’il décède inopinément lors d’un concert, suite d'une crise cardiaque. Son legs discographique pour le label Melodiya n’a jamais été diffusé régulièrement en dehors des frontières de l'URSS et il faut compter sur des labels discrets comme Weitblick pour proposer des captations de concerts. Dès lors, on accueille avec dévotion cette généreuse parution qui nous documente sur le chef à l’occasion de tournées britanniques de concerts avec la philharmonie de Leningrad. 

Dès les premières notes des extraits de La belle au bois dormant de Piotr Ilitch Tchaïkovsky, l’ambiance est sombre et symphonique. Pas de chorégraphie ici, mais une force instrumentale qui tétanise l'auditeur, les pièces du ballet en prennent une ampleur inédite.  Pièce de résistance, Francesca da Rimini se découvre ici comme un bloc compact à la puissance herculéenne. Point de jeux dramatiques, mais une tornade instrumentale portée par un orchestre démentiel d’engagement. Les couleurs très caractéristiques de l”école russe donnent à la partition une dimension sensorielle unique comme chauffée aux limites de la combustion. La Symphonie nᵒ 5 en mi mineur avance inexorablement dans une optique plus instrumentale que dramatique. L’élan est conquérant et s'additionne au refus des effets de manche : on n’est pas ici dans un trip égotique d”un chef qui se regarde diriger mais d”un chef qui sait diriger. Les timbres rauques de la phalange soviétique sont encore ici une expérience sensorielle. En bonus, on découvre une incroyable  Symphonie n°1 classique de Prokofiev qui commence foncièrement classique et posée mais qui se tend et s’accélère. Certes, l’effectif instrumental est plutôt massif mais l’oreille est admirative de cette gestion des tempi avec un final à la fois grave et jubilatoire. 

Le restitution sonore de ces captations de concert est des plus satisfaisantes et le livret est très intéressant. 

Bien que fort oublié, le chef d’orchestre anglais, d’origine roumaine, Constantin Silvestri (1913-1969) fut l’un des piliers de la vie musicale européenne et un acteur majeur de l’histoire de l’enregistrement. On le retrouve ici au pupitre du Bournemouth Symphony Orchestra dont il fut le directeur musical de 1962 à 1969 et qu’il imposa comme une référence en Grande-Bretagne avec des tournées et des disques pour HMV. Le chef d’orchestre avait une grande dévotion pour Chostakovitch dont il grava la Symphonie n°5 avec rien moins que le Philharmonique de Vienne en 1960. Il faut préciser que Constantin Silvestri avait eu l'occasion de travailler directement avec le compositeur lors de séjours à Moscou où il était régulièrement invité au début de sa carrière et il avait même vu Chostakovitch diriger sa Symphonie n°1.  Il conduit ici la Symphonie n°8. On tient une lecture solidement construite et plutôt rapide pour les mœurs interprétatives actuelles qui favorisent l’étagement des effets plus que l’impact dramatique brut. Mais l’élan n’est jamais précipité et la narration avance avec efficacité. Le Bournemouth Symphony Orchestra est concentré et appliqué avec d'excellents solistes des vents et des cuivres. La sympathique ouverture de Colas Breugnon de Kabalevsky dans une lecture bigarrée est un bonus bienvenu. Un disque certes intéressant mais pas fondamental. 

Note globale : 9/10 ( Arvīds Jansons) - ⅞ (Constantin Silvestri). 

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