John Zorn, aux confins du discours musical
Evènement au Klara Festival : la venue de l’inclassable John Zorn pour un (petit) concert à l’orgue de la grande salle du Palais des Beaux-Arts. On ne présente plus John Zorn, musicien aux identités artistiques multiples et aux inspirations aussi variées qui bigarrées.
Tout concert de John Zorn est une expérimentation, aux frontières du discours musical et avec une exploration sans fin du son dans une structure par bloc abrasifs. Le mythe de Faust, récurrence du Klara Festival 2019, trouve ici une incarnation parfaite sous les doigts de John Zorn : les sonorités fantomatiques qu’il tire de l’instrument et les chocs granitiques des masses sonores créent une ambiance irréelle et étouffante au point de faire partir quelques membres du public désarçonnés par cette violence musicale presque magmatique. Les moments de répits sont rares dans cette épuisante démesure de vagues musicales successives qui font vrombir la puissance de l’orgue.
Surprise, John Zorn sort quelques instants de scènes pour revenir avec la soprano et cheffe d’orchestre Barbara Hannigan. Ils se lancent dans une improvisation vertigineuse : John Zorn travaillant avec violence son clavier alors que la chanteuse explore un non discours dans une droite ligne de Ligeti et de Berio. L’addition de ces vocalises volontairement déstructurées avec la tension générée par l’orgue débouche sur un moment magistral, hors de tout temps musical défini !
Déconcertant, ce concert aura ravi le public acquis à la cause et à l’art de John Zorn, un art toujours intriguant, parfois déconcertant, mais toujours fascinant par sa radicalité inépuisable.
Bozar, 23 mars 2019
Pierre-Jean Tribot
Crédit photographique : Scott Irvin
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